J’entends encore les gouttes de pluie lourdes marteler mon capuchon durant cette montée très pentue, depuis le village des Avants-sur-Montreux vers la crête qui le surplombe au lieu-dit Sonloup. D’ailleurs, un funiculaire les relie, pour les touristes moins entreprenants, mais avides de sensations fortes face à la raideur du tracé. 
J’étais aux anges ! Je n’avais croisé personne, comme souvent. Et là, surpris, je me fais dépasser par une joggeuse en habits de sport très mince, complètement trempée, qui me demande si le chemin que nous suivons mène au village ou non. Elle avait visiblement besoin de se mettre au chaud, mais voulait aussi le faire en poursuivant sa course pour ne pas prendre froid. Elle parlait anglais. La chose qu’elle ne voulait pas faire était de rebrousser chemin par là d’où elle venait. Elle voulait un circuit un peu comme dans un stade ! Elle m’a donc dépassé à petites foulées nerveuses vers la crête toute proche. Pourtant, juste avant de l’atteindre à mon tour, je la croise, souriante, grelottante et rebroussant tout de même chemin, car c’était au plus court. Je ne l’ai jamais revue. Certains disent que la nature est habitée d’êtres surnaturels. J’ai dû en rencontrer ce jour-là !
Moi, j’ai poursuivi, sans varier, encore pendant plus d’une heure vers le Cubly, puis la ruine de la tour de Salausex.
Depuis Salausex, la pluie s’est faite moins insistante et la vue sur le lac Léman se dévoila par instants. C’est là que j’ai cassé la graine, avant de redescendre, à flanc de falaise, par le hameau de Hazot, vers la gare des Avants.
Il y a, aux ruines de la tour de Salausex, un abri de bois ouvert aux marcheurs de passage, un toit, pas de porte, mais une grande table et des bancs. De belles soirées en perspective…
Dans les prés les narcisses fleurissaient. J’étais venu chercher la fraîcheur et la pluie, je n’ai pas été déçu !
